dimanche 4 mai 2025


 

Ou comment on devient l’ambassadeur d’une idéologie qu’on n’avait jamais invitée à souper.

Le clic originel

Paul et Léa n’ont rien de particulier.
Lui est plombier. Elle enseigne au primaire. Deux citoyens ordinaires, deux cerveaux bienveillants, deux âmes numériques dans la jungle GAFA.

Un soir de novembre, fatigués de l’actualité vague et des conversations creuses, ils tapent la même recherche :

« Qui est vraiment Donald Trump ? »

Pas pour l’aimer. Pas pour le haïr. Juste… pour comprendre.

Mais comprendre n’est pas ce qu’offrent les dieux silencieux de la Silicon Valley.
Non. Ce qu’ils offrent, c’est du contenu ciblé.
Et ce qu’ils ciblent… c’est votre attention.

L’algorithme ne vous aime pas. Il vous trie.

Paul clique sur une vidéo où Trump parle des petits travailleurs, des vrais patriotes, des emplois sacrifiés.
Léa, elle, tombe sur un documentaire-choc sur les émeutes du Capitole.

Ils sont touchés, chacun à leur manière.
Ils recliquent.

YouTube comprend. Facebook jubile. Meta enregistre. Google affine.
Le moteur est lancé.

Les milliardaires des GAFA n’ont que faire de vos opinions.
Mais votre réactivité émotionnelle ? Ça, c’est de l’or.

De curieux à convaincus

En quelques jours, Paul devient patriote.
Il rejoint un groupe Facebook nommé "La vraie voix du peuple".
Il y découvre des gens qui pensent comme lui. Il partage. Il s’énerve. Il s’engage.
Il rit des "moutons" qui regardent la télé.

De son côté, Léa devient résistante.
Elle suit une page sur la protection de la démocratie. Elle lit des articles fouillés.
Elle signe une pétition. Elle se méfie de tout ce qui a une casquette rouge.

Ils sont sincères.
Ils sont intelligents.
Ils sont piégés.

Ce que l’algorithme ne vous dit pas

Ce ne sont pas vos convictions qui sont en cause.
Ce sont les fondations invisibles de ces convictions.

L’algorithme ne cherche pas la vérité.
Il cherche ce qui fait réagir.
Il ne vous informe pas.
Il vous transforme.
Et surtout : il vous oppose.

Les émotions, ce nouvel or numérique

Rien de plus rentable qu’un humain fâché.
Paul et Léa s’indignent, partagent, dénoncent.
Ils deviennent producteurs gratuits de contenu émotionnel, convertis en temps d’écran, en publicités ciblées, en dollars pour les actionnaires invisibles.

L’algorithme ne vous radicalise pas par méchanceté.
Il vous radicalise par calcul.

La nuance ?
Ça ne clique pas assez vite.
Ça ne vend pas.
Ça ne rapporte rien.

Et le doute s’efface doucement…

Paul lit un article critique sur Trump. Il le ferme en ricanant :
« Encore les médias gauchistes. »
Léa tombe sur une vidéo d’un fermier pro-Trump. Elle la bloque :
« Désinformation toxique. »

Ils ne cherchent plus à comprendre.
Ils cherchent à confirmer.

Vous n’êtes pas polarisés.
Vous êtes monétisés.

Ce qu’aucun d’eux n’a vu venir, c’est que leur polarisation n’est pas une évolution politique.
C’est un effet secondaire algorithmique.

Ils ne sont pas devenus plus intelligents. Ni plus informés.
Ils sont devenus plus utiles au système.

Paul et Léa sont désormais parfaitement exploitables.
Ils interagissent. Ils partagent. Ils défendent leurs idées comme s’ils les avaient pensées eux-mêmes.

Mais ils ont été pensés pour eux.
Deux clics. Deux vies. Zéro lucidité.

Et tout ça, pour une question.
Une recherche anodine.
Un clic de trop.

La morale des Papes :

« Vaut mieux plus de conscience que d’abondance. »

Car l’abondance numérique, si on n’y prend pas garde, vous noie, puis vous vend.
Vous pensiez que vous étiez informés ?
Non. Vous êtes ciblés.
Vous pensiez qu’on respectait votre curiosité ?
Non. On l’a exploitée.

Une mise en garde s’impose :

À toi, lecteur ou lectrice, nous posons cette question :
Sur qui comptes-tu vraiment pour t’informer ?

Si les plateformes comme Facebook, YouTube ou X (ex-Twitter) sont devenues ta source principale d’actualités, alors il est peut-être temps de faire une pause.

Leur logique est commerciale, non journalistique.
Ce sont des usines à clics, pas des lieux de réflexion.

Préfère les médias traditionnels :
La Presse, Le Devoir, Radio-Canada, et d’autres qui, même imparfaits, s’appuient sur des principes éthiques fondamentaux :

  • Vérification rigoureuse des faits

  • Indépendance éditoriale

  • Respect de la vérité et de la dignité humaine

  • Transparence des sources

  • Distinction claire entre nouvelles et opinions

Ces règles, les journalistes professionnels doivent les suivre.
Elles ne sont pas facultatives. Elles sont leur socle.

Et elles sont le dernier rempart contre le chaos de l’information transformée en marchandise.

Et toi, cher lecteur, qui es-tu devenu à ton insu ?

Peut-être l’un des leurs.
Peut-être un des nôtres.
Ou peut-être… une conscience encore libre.

Mais à condition, cette fois,
de cliquer ailleurs.

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