Par Les Papes – 23 juin 2025
L’attaque américaine contre le site nucléaire de Fordo, perçue comme un coup stratégique pour freiner les ambitions atomiques de l’Iran, pourrait bien n’être qu’un pion déplacé sur un échiquier plus complexe. Et si, en réalité, ce site n’était qu’un leurre ? Une mise en scène par Téhéran pour entraîner Washington dans une spirale de légitimation de la radicalisation régionale et de désaveu diplomatique global ? Explorons l’hypothèse : et si Fordo était la corde que l’Iran a tendue aux Américains pour se pendre ?
🧩 1. Ce que l’on sait de Fordo (faits établis)
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Fordo est un site souterrain fortement fortifié, situé près de Qom, en Iran, conçu pour résister à des bombardements.
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Il est connu depuis au moins 2009 (source : IAEA), et l’Iran y a enrichi de l’uranium à des taux supérieurs aux limites fixées par l'accord de 2015.
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En juin 2025, une frappe américaine — avec appui tactique israélien — a ciblé Fordo.
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Selon une analyse relayée par l’armée israélienne, Fordo n’a pas été entièrement détruit et du matériel aurait été déplacé avant l’attaque (NYT).
🧠 2. Hypothèse centrale : Fordo, un leurre stratégique
Cette attaque pourrait, selon des experts en guerre psychologique et stratégie militaire, avoir été anticipée et orchestrée par l’Iran pour :
➤ A. Provoquer une escalade contrôlée
Le régime iranien, fragilisé par des contestations internes et un isolement diplomatique accru, pourrait chercher à recentraliser la loyauté nationale autour d’une menace extérieure commune — les États-Unis. L'attaque sur Fordo, bien que spectaculaire, aurait pu servir à rallumer le nationalisme.
« Rien n’unit plus un peuple qu’un ennemi extérieur désigné. » — Thucydide, réactualisé par l'analyste Ali Vaez (International Crisis Group)
➤ B. Piéger les Américains sur la scène internationale
En attaquant un site connu, déjà sous surveillance de l’AIEA, les États-Unis risquent de passer pour des agresseurs unilatéraux, surtout si aucune preuve tangible d’un danger imminent n’est fournie. Cela affaiblit la crédibilité américaine dans les forums internationaux (ONU, UE, BRICS+).
→ Voir l’analyse du European Council on Foreign Relations (ECFR), qui souligne la tendance des États non alignés à désapprouver les actions préventives non légitimées.
➤ C. Détourner l’attention d’autres sites sensibles
Et si l’objectif réel du programme nucléaire iranien avait été déplacé ailleurs, en silence ? Fordo aurait alors rempli son rôle de cible sacrificielle, détournant l’attention des agences occidentales.
Scénario plausible, selon un rapport de la Fondation pour la défense des démocraties (FDD), qui évoque depuis 2023 des infrastructures souterraines à Natanz et ailleurs difficilement détectables.
📉 3. L’effet boomerang pour les États-Unis
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Croyance ébranlée : La promesse de « neutralisation complète » du site Fordo a été immédiatement contredite par les évaluations israéliennes elles-mêmes.
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Soutien international en berne : Même les alliés européens de l’OTAN restent silencieux ou critiques. L’Allemagne a demandé à Washington de clarifier les fondements juridiques de la frappe.
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Renforcement des alliances russo-iraniennes : Moscou s’est immédiatement positionné comme défenseur de l’Iran dans ce dossier (voir Russia Today, 23 juin 2025), ce qui pourrait accélérer le contournement du dollar et de SWIFT dans la région.
🔄 4. Mais… et si ce n’était qu’un raté opérationnel américain ?
Il ne faut pas exclure que :
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Les services américains aient mal évalué l’efficacité de la frappe, ou aient été volontairement mal renseignés par des sources alliées, comme Israël, pour forcer leur main.
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Trump, dans une logique électorale, ait précipité cette action pour montrer une posture de fermeté.
Conclusion : Qui tire vraiment les ficelles ?
Fordo est peut-être le symbole d’un jeu de dupes, mais ce n’est peut-être pas l’Iran qui l’a tendu. Dans un monde où la guerre informationnelle prime sur le terrain, il devient de plus en plus difficile de distinguer la manœuvre tactique de l’erreur stratégique.
La seule certitude ? La crédibilité américaine, déjà fragilisée depuis le retrait de l’accord sur le nucléaire iranien en 2018, subit un nouveau coup dur. Et pendant ce temps, le régime iranien affiche son calme, sa résilience… et sa préparation.
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